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Les ambitions africaines de Recip Erdogan – Paris Match

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Un colloque animé par l’intellectuel tunisien Mezri Haddad a réuni des figures politiques, militaires et intellectuelles à Paris pour décrypter le « système Erdogan ».

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Mezri Haddad, philosophe tunisien, ancien ambassadeur de son pays auprès de l’UNESCO est un homme qui, depuis l’avènement des « printemps arabes », ne décolère pas. Est-il visionnaire ? Haddad avait prévu le chaos laissé derrière lui par ces révolutions façon Internet, et avait tout spécialement prédit le triomphe de l’islamisme dans l’ensemble des pays touché par ce « printemps ».

Ayant été le premier haut fonctionnaire à démissionner en 2011, il a préféré l’exil en France que « la collaboration avec un régime islamiste modéré ». La déshérence de sa carrière, l’ancien diplomate l’occupe à combattre tous ceux, individus et États facilitateurs et pourvoyeurs idéologiques ou financiers de l’islamisme. Ainsi l’intellectuel a créé, c’est bien normal, un « think tank » (Le Centre International de Géopolitique et de Prospective Analytique, CIGPA) qui analyse les dérives de l’islam –qu’il soit fou ou « politique »- dans le fonctionnement du monde Arabe et musulman.

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Mezri Haddad lors du deuxième colloque de son Think Tank à Paris, le 15 octobre 2016, décrypte la manière dont Erdogan a voulu tirer profit des « révolutions arabes »© CIGPA
En mai dernier, sous forme de colloque, la première cartouche tirée par le CIGPA visait, justement, l’histoire vraie de ces  « printemps » sans hirondelles. C’est-à-dire la mise à jour de ceux qui, comme le Qatar et les Etats-Unis, ont soufflé, avec des moyens financiers importants et beaucoup de savoir-faire, sur les braises d’un mécontentement social justifié. Lors d’un colloque haletant, réunissant aussi bien Mohamed Dahlan, l’ancien ministre de l’Autorité Palestinienne et principal négociateur des accords d’Oslo, que Sid-Ahmed Ghozali, ex Premier ministre d’Algérie ou Kamel Morjane qui fut ministre de la Défense en Tunisie, la mécanique des « printemps » a été mise à nue, les causes et conséquences analysées. Tout cela par la foi des hommes engagés en politique et des universitaires du genre pointu.

 « La Turquie des Frères Musulmans est bien néo-ottomane » Hassan Asfour

 Le 15 octobre dernier Haddad et le CIGPA, en partenariat avec l’IPSE que dirige Emmanuel Dupuy, ont à nouveau secoué ce cocotier de « l’islam politique ». Cette fois lors d’un second colloque consacré à la Turquie, guidée à courtes rênes par un Erdogan qui rêve de conduire son pays vers un nouveau califat ottoman. Pour cette cession du CIGPA, l’attente des auditeurs a été comblée, ce nouveau « think tank » démarre fort : le système Erdogan, si complexe et variable, a été passé à la moulinette. Discrètement, sur la trace d’un Kadhafi -qu’il a contribué à abattre-, Erdogan soutient ses réseaux en Afrique. Après le choc initial, l’installation du chaos libyen auquel il a activement contribué en soutenantAbdelhakim Belhadj, l’ancien compagnon de Ben Laden, et le solide coup de main donné aux Frères musulmans d’Ennahda en Tunisie, Erdogan tisse sa toile au Maghreb et sur le continent africain

Ses agents discrets ? Les Frères Musulmans. Dans le monde entier, Erdogan veille à la bonne santé de l’islam radical… ne vient-il pas de fustiger le gouvernement de Dacca  pour avoir exécuté un activiste et djihadiste bangladais…?

 

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Hassan Asfour à Paris le 15 octobre 2016. L’ancien ministre de l’Autorité Palestinienne fustige les ambitions néo-ottomanes d’Erdogan

A la tribune c’est d’abord Hassan Asfour, ancien ministre de l’Autorité Palestinienne qui affirme : « La Turquie des Frères Musulmans est bien néo-ottomane« . Les études de David Rigoulet Roze, responsable de la revue « Orient Stratégiques », et celle de François Campagnola, chercheur à l’Institut Prospective et Sécurité en Europe, viennent confirmer la vision du ministre palestinien : se tenant sur le fil du rasoir, la Turquie prend le risque de basculer vers une république radicalement islamiste.

Connaissant le nouveau pacte entre Poutine et Erdogan, alors que des diplomates russes, venus nombreux se tiennent dans la salle,  l’universitaire Mohamed Troudi  rappelle la longue litanie des conflits ayant émaillés l’histoire des deux pays. Caroline Galactéros, docteur en sciences politique et colonel de réserve de l’armée, met  son expertise au service d’un thème, celui de la duplicité d’Erdogan dans les différents conflits. Ceux qu’il conduit ou soutien dans la région comme un président décrit en marionnettiste. Son pays étant la matrice historique des Frères Musulmans en 1928, le journaliste et écrivain égyptien Abdel-Latif Menawry, lance son analyse qui avait le ton d’un appel. Cri de celui qui sait son pays menacé par une épée de Damoclès, la Confrérie des « Frères », celle-là même qui avait mené à la partition un grand pays africain: le Soudan.

 

« Subtiles intrigues d’Erdogan en Europe et en Afrique », selon Renaud Girard

 

Michel Rimbaud, ancien ambassadeur de France en Syrie, un homme qui a toujours pratiqué la diplomatie « debout », jette beaucoup de lumière sur les intrications d’Erdogan dans le bourbier syrien. La Turquie, elle aussi à l’initiative du « printemps » contre Bachar, n’a, dit l’ambassadeur, cessé de multiplier les intrigues, de provoquer des conflits annexes et, c’est capital pour l’Europe, de jouer un jeu mortel contre elle en agitant à sa guise les flux de réfugiés venant se jeter sur les côtes grecques.Il fallait bien une héroïne pour cette journée… elle n’a pas manqué. Personnalisée par Zohra Mansour, une juriste, ancien ministre de Kadhafi chargée de la condition féminine. Elle vit aujourd’hui recluse en France, après avoir connu prison et torture par les nouveaux maîtres de Tripoli que l’Occident à soutenu. L’émotion dégagée par cette femme -qui porte le voile parce qu’elle n’a plus de cheveux après les sévices infligés- s’est si chaleureusement propagée que c’est un auditoire debout qui applaudit son ultime phrase « J’accuse Erdogan d’avoir commis des crimes dans mon pays ! »Charles Million, ancien ministre de la Défense, ancien ambassadeur, intervient pour affirmer, aujourd’hui, l’impossibilité d’aller plus avant dans le processus d’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne. Renaud Girard, qui est le Sirius du Figaro, et aussi un géopoliticien bardé de diplômes qui a le courage de porter ses pas là où est le danger et la guerre, vient, lui aussi, mettre en garde l’Europe contre les subtiles intrigues d’Erdogan aussi bien en Europe que sur le continent africainque l’ancien ministre de Jacques Chirac connaît si bien. Intrigues et duplicité d’Erdogan. Un forgeron qui n’hésite pas à faire chauffer tous ces fers ensemble.Au fil des heures, le colloque ne perd ni plumes ni auditeurs, Haddad ayant su éviter ces interventions « tunnel » qui découragent la curiosité. C‘est donc une salle encore fraîche qui a entendu la savante analyse deJean Marcou, professeur à IEP de Grenoble, un turcophone, qui parlait ici des relations entre le Turquie et Washington… Là encore une longue valse-hésitation. Pour en arriver à ces moments d’aujourd’hui où Obama a jugé bon de retirer ses armes nucléaires des base turques alors que l’on se demande si Ankara, qui pratique le chantage sur le sujet, ne va pas quitter l’OTAN…Younous Omarjee, un député européen, français d’origine indienne, ramène la salle vers les bidonvilles et les cales de bateaux, et traçant un portrait intelligent d’une immigration imposée à l’Europe par Erdogan. Sans pour autant que le député ne s’en prenne aux malheureux migrants: « avec cette Afrique à croissance exponentielle, les guerres et conflits, une politique cohérente de l’Europe s’impose. Contre des choix instantanés, inconséquents, cruels et catastrophiques. »

 « L’Egypte devait être la nouvelle porte sublime pour sa conquête de l’Afrique »

Indigné par l’ingérence dans les affaires intérieures de l’Egypte, Abdel-Latif Menawi, patron de la chaîne de télévision égyptienne Al-Ghâad et intellectuel écouté par la nouvelle élite dirigeante, a rappelé « les liens idéologiques et structurelles entre les Frères musulmans égyptiens et leur ramification turque ». Selon lui, l’arrivée au pouvoir des islamistes en Egypte, grand pays arabe, musulman et africain, était une opportunité politique pour « le sultan » d’Istanbul, qui voulait faire du pays de Nasser et Sadate une porte stratégique pour la conquête de l’Afrique, « particulièrement les pays soumis au harcèlement terroriste de Boko Haram, des Chebab et d’Al-Qaïda ». C’est que pour l’intellectuel égyptien, entre les mouvements islamo-terroristes africains et la confrérie des Frères musulmans, il n’existe pas d’antagonisme mais des liens de complémentarité. Le combat de l’Egypte et des pays africains contre le terrorisme est aujourd’hui commun autant que vital pour toute la région. Présent au premier rang dans la salle, ce n’est pas l’ambassadeur du Tchad et doyen des ambassadeurs africains en France, Hissein Brahim Taha qui l’aurait démenti.Ancien officier des Renseignements Généraux, spécialiste de l’islam au ministère de l’Intérieur, homme de culture aujourd’hui sociologue, Bernard Godard conclu les interventions de cette journée roborative. Il soulève un coin de voile (si l’on peut dire), celui du rôle joué en France par ces associations turques qui sont d’abord des relais et têtes de pont des Frères Musulmans. Tout cela principalement en Alsace, région qui sert de base arrière aux « Frères » installés dans l’Allemagne voisine.  Ainsi, sous de faux nez, les « Frères » ont été présents, sur des listes électorales, lors des dernières élections municipales françaises.  C’est le dernier scoop dans une journée qui n’en manque pas. La nuit tombe sur Saint Germain des prés, sur le parvis de la salle, le stoïcien Mezri Haddad, patron du CIGPA, peut tirer le rideau sur son spectacle d’idées. Il a bien rempli son rôle en présence, ce qui est actuellement en France un geste diplomatique, deMikhail Ermakov, l’attaché Naval à l’ambassade de Russie à Paris. Ce dernier a même adressé, à Poutine une note sur le contenu du colloque ! Question : l’homme de fer de Moscou va-t-il domestiquer son nouvel allié, Erdogan le sultan qui veut devenir calife ?

Paris-Match

 

One thought on “Les ambitions africaines de Recip Erdogan – Paris Match

  1. la turquie intervien partout en afrique surtout en afrique centrale avec l islam au tchad la cooperation turco-tchadien se renforce par leur intervention aux enseignement religieux dans les ecoles d amitie et coranique et soutiens financier aux groupes musulmans.

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